Nataniel von Hardstein

L'histoire de ma vie... Vous la conter n'est pas chose aisée. Il m'est difficile de passer outre les regrets et le chagrin. Je ne suis pas grand orateur, je suis un homme d'action, solitaire... enfin, jusqu'à aujourd'hui.

Longtemps, ma vie fut faite d'errance... de fuite. Je suis pourtant né dans une famille aisée. Rien ne semblait présumer des malheurs à venir. Enfant choyé au milieu d'une famille soudée et aimante, je ne sais que trop bien ce qui a mal tourné et aujourd'hui encore, j'ai peine à l'évoquer...

Mon père possédait un petit lopin de terre, dans ce royaume qu'on nomme Verya. Aîné de la famille, je devais un jour lui succéder. La vie de paysan, loin du gouvernement et des nobles, est somme toute tranquille et les revenus de notre petit domaine suffisaient largement à couvrir les taxes et à offrir à terme un beau mariage à mes sœurs.

Tout semblait pour le mieux la routine quotidienne n'avait rien d'inquiétant, au contraire. Cependant, comme souvent dans ce genre de cas, ma chute vint d'une faiblesse propre à l'homme...

Elle prit la forme d'une brunette toute menue au sourire timide et aux grands yeux. Cette fille trimait tous les jours dans un champ voisin de celui où je travaillait avec ma mère. Lorsque je la remarquai la première fois, je fus touché au plus profond de mon cœur et je passai le reste de la journée à l'observer à la dérobé.

Le soir venu, de retour à la ferme, j'interrogeai ma sœur Livia, qui était toujours au courant de tout ce qui ce passait sur tous les domaines plusieurs lieues à la ronde. Elle promit de se renseigner.

Le lendemain, au souper, elle me prit à par pour me raconter ses découvertes. Cette fille avait dix-sept ans (à peine deux de moins que moi à l'époque) et venait d'arriver à la ferme McGory, notre voisin immédiat (ses terres jouxtaient les nôtres). Le vieux McGory vivait seul et employait nombre de fermiers sans terre. L'adolescente se nommait Marine et s'était une esclave.

"Elle n'a plus de famille, m'apprit Livia. Elle n'a pas eu d'autre choix. C'était ça ou le trottoir dans les bas-fonds d'une cité."

J'imaginai bien que dans la région, seul un vieil aigri comme McGory pouvait accepter de prendre un esclave à son service. Nous avions tous conscience de la chance que nous avions de posséder nos terres et nos maisons et d'échapper ainsi au dur choix qui guettent beaucoup des pauvres de cette contrée : se faire esclave ou mourir dévoré par une bête sur les routes.

Je renonçai à m'approcher de Marine. Son statut lui interdisait de toute façon le mariage et une aventure avec elle n'aurait fait que m'attirer des ennuis. Mais mes bonnes résolutions ne durèrent qu'un temps.

Tous les jours, je la voyais aux champs, les joues rougies par le vent et le soleil. Elle ne ménageait pas sa peine. Labourer, planter, entretenir... Elle faisait tout ça avec la même envie que si cela avait été ses propres terres.

Elle m'avait remarqué et lorsqu'elle me surprenait à la fixer, elle m'adressait un signe ou un sourire avant de se remettre à son labeur. Je finis par ne plus tenir et un matin, je l'abordai.

Nous mîmes plusieurs jours à faire connaissance. Elle n'osait pas rester me parler longtemps, mais elle ne refusait jamais d'échanger quelques mots le matin avant de se mettre au travail et le soir avant de reprendre le chemin de la ferme.

Au début, je crois qu'elle pensa que je m'amusai à ses dépends. Elle n'imaginait pas que je puisse être intéressé par une esclave, sentiment que devait lui faire ressentir son entourage immédiat. En effet, les autres employés de McGory la traitait avec distance, sinon mépris. Même ma sœur m'avait conseillé de ne pas insister et de l'ignorer. C'est quand je lui rapportai cette conversion, passablement outré que ma propre famille puisse penser ainsi, que Marine commença à me faire confiance.

Finalement, j'aime à m'attarder sur cette époque. J'étais heureux en ce temps. Jeune et insouciant. Mais Marine devint bientôt très proche de moi. Je ne sais pas si je lui plu du simple fait que j'étais le seul à m'intéresser à elle ou si elle finit par réellement m'aimer. En tout cas, nous vécûmes pendant une longue et belle année aussi proche que nous le pûmes. Je la rejoignais souvent dans la grange où McGory l'hébergeait.

Nous fûmes amants et à défaut de nous aimer au grand jour, nous nous cachâmes de tous. Jusqu'au jour où McGory nous surpris.

Nous avions été imprudent et un matin où j'étais resté trop longtemps avec elle, il entra dans la grange et nous découvrit tous les deux encore enlacés. Je ne sais pas très bien pourquoi sa colère fut si grande, je m'attendais surtout à des moqueries de sa part et à me retrouver la risée de toute la communauté, mais il entra dans une rage démentielle.

Sous mes yeux, il entreprit de battre Marine avec une force alarmante. Quand je fis mine de interposer, il m'étala d'un coup de poing et repris sa besogne, accablant ma compagne de coups violents. Sans réaliser ce que je faisais, je m'emparai d'une fourche et lui la plantait dans le dos.

Il émit une sorte de râle, se tourna vers moi, le visage gonflé de rage et déformé de souffrance. Et il s'écroula mort.

Je dus fuir. Tuer un homme pour protéger une esclave me conduirait directement à l'exile et à la mort. Marine m'accompagna, mais notre cavale dura peu de temps. Les soldats nous retrouvèrent bientôt, j'assistai impuissant à la mort de elle que j'aimai, violée et battue par ces hommes d'armes qui prétendaient faire régner l'ordre et la justice.

Je fus jugé et condamné, et après plusieurs mois dans un cachot sordide, je fus conduis à demi mort de faim aux frontières du royaume et livré à Koran. J'ignore comment je survécu. Mais le fut le cas et je jurai de me venger.

Ce que j'appris dans les bois, à la merci des créatures monstrueuses qui les peuples, me permit de développer des capacités que je ne me connaissais pas. Je devins bien plus endurant et fort que dans mon souvenir. J'avais failli mourir, mais je revenais plus déterminer que jamais. A l'époque, j'aimai à m'imaginer, dans mes moments de folie, que Koran lui-même s'était penché sur moi pour faire de mon être l'instrument de sa propre haine.

Car la haine me consumait. Elle me poussait chaque jour à revenir à portée de vue des remparts du royaume. Les soldats en faction me voyaient parfois, et l'un d'eux essaya même de m'abattre d'une flèche.

Un jour, une patrouille fut envoyer pour me chasser. Je m'enfonçai dans les bois et elle s'y perdit. On ne tenta plus de me nuire par la suite et je restai là, impuissant à exercer ma vengeance, à demi fou, chassé la nuit par les créatures de cette région maudite et le jour, observant sans relâche ces murs qui m'interdisaient de rentrer chez moi.

Je ne sais pas combien de temps je vécu ainsi, tiraillé entre la peur et la haine, marchant au bord du précipice obscur de la folie et y glissant de plus en plus sûrement. Je finis cependant par partir.

Je marchais, marchais, marchais encore. La nuit, je me cachai avec de plus en plus de talent. Je trouvais ma nourriture dans les bois, la moindre caverne devenait mon foyer.

C'est ainsi que je finis par vous trouver... et je dois bien reconnaître que je n'aspire à présent plus qu'à oublier tout ça, et à refaire ma vie... puisse cela m'être accordé.

Cela va t'être accordé!

Excellent BG! Plus c'est long, plus c'est bon, c'est c'qu'on dit

Bref, ton inscription est d'ores et déjà validé!

Je t'envoi un petit MP de ce pas

Et merci pour la lecture!

Un réel plaisir à lire, félicitation !

Bienvenue dans l'aventure ( et ce, officiellement monsieur ! )

Merci ! Ce fut un plaisir de l'écrire.

exellent BG, j'ai adoré

Belle plume!
Encore bienvenue et au plaisir de se croiser ig

merci !